Évidemment, La Très très grande classe est très très loin du chef d’oeuvre, comédie estivale avec l’ineffable Melha Bedia, Audrey Fleurot qui profite des joies d’être « bankable » et François Berléand en second-rôle de luxe. C’est surtout l’occasion pour Edgar de croiser la route d’Arié Elmaleh, comédien de théâtre et de cinéma volontaire et sincère.
Comment présenteriez-vous votre personnage dans La Très très grande classe ?
Je joue Benoît Hinault, un inspecteur d’académie passionné de littérature et de langue française. C’est quelqu’un de très naïf, de très idéaliste, qui tombe absolument sous le charme d’une professeure interprétée par Melha Bedia. C’est un type porté par l’envie de faire le bien autour de lui et qui va être déstabilisé par cette rencontre.
Avez-vous une inclination particulière pour la comédie ?
Ça a été le cas pendant des années. J’adore la comédie. Au risque de faire une lapalissade : du moment que c’est drôle… Tout cela tient beaucoup à l’écriture. Également à la sincérité. Sinon, cela ne prend pas. Pour moi, La Très très grande classe est d’un genre particulier. C’est très inspiré du cartoon, de la bande-dessinée. Frédéric Quiring, le réalisateur, a une façon de diriger les comédiens qui les pousse à aller à l’extrême de leurs travers. Cela donne un ton unique, enlevé, souvent piquant afin de créer le rire. Je définirai le film ainsi : une comédie romantique burlesque. Avec une petite touche de social.
Vous aimez les personnages naïfs, lunaires…
Oui, comme Benoît, dans le film. Il n’a aucune mauvaise intention. Il est tout d’un bloc.
« Ces derniers temps, on me donne pas mal de rôles de flic. C’est sûrement la petite quarantaine qui arrive. »
Vous semblez chercher la légèreté au cinéma et le sérieux sur les planches à travers des textes et des auteurs à ambitions. Tracez-vous une démarcation entre théâtre et cinéma ?
Je vais être honnête avec vous : si c’est le cas, ce n’est pas du tout de mon fait. J’ai aussi joué des choses très légères au théâtre. Ma dernière pièce, c’était La Perruche d’Audrey Schebat, à la fois très drôle et très profonde sur le rapport hommes/femmes, la fidélité, le désir. J’aurais tendance à ne pas vouloir choisir un camp. Il y a tellement de registres que j’aime visiter, je préfère ne me priver de rien. A la télévision, par exemple, j’ai fait des choses plus sombres comme un policier, un père violent… J’ai longtemps joué les bons copains ou les ados attardés. Ces derniers temps, on me donne pas mal de rôles de flic. C’est sûrement la petite quarantaine qui arrive.
Jamais de frustration ?
On ne peut pas avoir le contrôle ou la mainmise sur ce que les gens projettent sur vous. Il y a une époque où, c’est vrai, on me proposait exclusivement des comédies. Après, il y a toujours quelque chose à défendre. C’est la qualité des textes qui prône. Est-ce complexe ? Est-ce émouvant ? Est-ce spirituel ? J’avoue, il m’est arrivé de jouer dans des pièces qui n’étaient pas toujours des drôles ou des films peu convaincants ! (Rires) Mais dans l’ensemble je suis heureux.
Plus de vingt ans de carrière au cinéma. Un bilan ?
Généralement, les bilans, je n’ai pas trop le temps d’y réfléchir. J’ai plutôt envie d’aller de l’avant, vers des choses qui me plaisent, d’inverser les tendances. Ces derniers temps, j’avoue, j’ai fait beaucoup de projets qui m’attiraient. Je suis en harmonie avec ce que je tourne. C’est très agréable.
« J’aime de plus en plus les gens aptes au bonheur. Y compris dans mon métier. »
Un passage presque obligé, la question « frère » au sujet de vous et de Gad : vous confond-on parfois ?
C’est vrai qu’on se ressemble pas mal physiquement, mais on ne nous a jamais vraiment confondus. Avec mon frère, on se ressemble sans se ressembler ! C’est très bizarre. Quand les gens apprennent que je suis le frère de Gad Elmaleh, il est tellement adulé qu’ils ne peuvent s’empêcher de me parler de lui. Comme si c’était un moyen plus simple de l’approcher en venant directement à moi. Gad, les gens, il les rend un peu fous. J’ai vu des personnes très intelligentes devenir débiles en le rencontrant. Mais bon, c’est la nature humaine. Il faut l’accepter.
Vos parents faisaient de la scène. Était-ce une drôle d’éducation de grandir dans une famille d’artistes ?
Mes parents le faisaient en amateur. Mais, somme toute, mon frère et moi, nous avons eu le goût de la scène en les voyant faire des spectacles. Le plaisir est né de là. C’est comme dans certaines familles religieuses où les enfants vont à l’église ou à la synagogue. Nous, nous allions faire du café-théâtre avec nos parents. C’était quelque chose dans lequel on croyait. Ça s’est transmis. Je vois ça avec mes propres enfants. Quand je joue au théâtre, ils aiment m’accompagner, regarder le public entrer, traîner dans les coulisses… C’est un univers qui reste très particulier.
Et gardez-vous toujours le même plaisir à jouer ?
J’ai pris en maturité. Aujourd’hui, j’ai plaisir à travailler avec les gens qui sont simples, avec lesquels je sais que tout va bien se passer. J’aime de plus en plus les personnes aptes au bonheur. Y compris dans mon métier.
La Très très grande classe de Frédéric Quiring avec Melha Bedia, Audrey Fleurot, Arié Elmaleh… Sortie le 10 août.
Photos : Hugo Souchet (portraits) et Marc Bossaerts (film).
Signature « historique » d’Edgar pour le cinéma, lecteur insatiable, collectionneur invétéré d’affiches de séries B et romancier sur le tard (Le Fantôme électrique, éd. Les Presses Littéraires).
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