Barbara Cabrita passe avec allégresse des séries à succès (RIS, H24, Sam…) aux fictions solides pour le petit écran. Dans Poulet Grillés, elle incarne la commandante Capestan, flic déchue, à qui la police redonne sa chance en prenant les rênes de la mystérieuse 4e Brigade, en fait un repère de « bras cassés ».
Aviez-vous lu le roman de Sophie Hénaff dont Poulets grillés est adapté ?
Pas du tout. J’étais censée les recevoir – Sophie Henaff a écrit trois livres – mais il y a probablement eu une erreur dans les envois. En plus, j’étais en tournage pendant quatre mois. Le temps a passé très vite et je me suis retrouvée au premier jour de tournage de Poulets Grillés. J’ai fait en fonction de ce que j’ai lu dans le scénario, de mon ressenti. Sur le tournage, tout le monde me parlait des livres, les techniciens, les habilleuses… Beaucoup de monde avait insisté pour faire partie du projet après avoir lu le bouquin. Cet élan m’a mis la puce à l’oreille.
La commandante Capestan, c’est un chien dans un jeu de quille…
C’est vrai, lorsqu’on la voit, qu’on l’imagine mal se fondre dans cette équipe de bras cassés de la police. Finalement, elle aussi porte un boulet malgré elle. Elle ressort d’une mise à pied, elle est seule. Capestan est mise à nue dès le début, avec ses failles. Elle ne feint rien. Sa vulnérabilité va se fondre dans celle du reste de la 4e Brigade. C’est assez inattendu. Elle va évoluer en se demandant si, finalement, cette équipe en place est plus équilibrée qu’elle-même. Ça m’a beaucoup plu.
La French, La Cage dorée au cinéma… RIS, H24, Sam à la télévision… Où vous sentez-vous le mieux ?
C’est vrai que le rythme de tournage à la télé est très intense. Parfois, il faut savoir prendre ses distances, prendre du recul pour nourrir le personnage, avoir sur lui une ouverture différente. C’est là que les idées viennent. C’est vrai qu’au cinéma, vous pouvez avoir l’impression d’un rythme plus leste et plus lent. Ça peut arriver. Avoir le temps, c’est plus de champ libre dans vos réflexions, vos idées, votre sensibilité. Vous avez le loisir de faire évoluer le personnage. J’aime bien ces moments de calme. Ensuite, c’est vrai qu’à la télévision, le rythme est tellement rapide que vous n’avez pas le temps de réfléchir : vous foncez. C’est un art brut. C’est tout aussi intéressant. Je ne saurais choisir l’un plus que l’autre.
Barbara Cabrita, bientôt 40 ans : avez-vous la moindre angoisse pour vos rôles à venir ?
Je n’appréhende pas du tout. Je ne suis pas attachée à ça. Et puis, les choses ont tout de même évolué. L’âge « critique » pour une actrice, je pense qu’on pouvait encore en parler, il y a dix ans. Sûrement. Aujourd’hui, le rapport à la femme est différent. Le regard posé sur elle est celui qu’elle a sur elle-même. Je trouve qu’elle assume mieux qui elle est, l’âge qu’elle a. Elle en est fière et ne cherche pas à le cacher. Nous sommes en train de nous dévoiler dans tous les sens du terme. Il y a de la place au cinéma, à la télévision, pour les femmes de 40 ans. Personnellement, je ne me pose pas du tout la question. Et puis, honnêtement, depuis mes débuts, je ne me suis jamais dit que ça durerait toute ma vie. Cela fait déjà 20 ans et je suis très contente.
Vous verriez-vous faire autre chose ?
Franchement, beaucoup de choses différentes m’attirent. Je me rapproche de plus en plus de la nature. Je viens d’acheter une grange de village dans le Sud de la France. Je me sens connectée à tout ce qui m’apporte calme et recul par rapport à mon métier. Et puis, j’ai fait une licence d’anthropologie. Pourquoi ne pas reprendre dans cette voix-là ? Ou bien encore, je me passionne pour les méthodes d’éducation alternative. J’ai beaucoup de pistes.
« Honnêtement, depuis mes débuts, je ne me suis jamais dit que ça durerait toute ma vie »
Si vous deviez avoir un regret en tant que comédienne ?
Un en lien avec La Cage dorée, qui a été pour moi une expérience tellement bouleversante. Quand il y a eu la promotion du film au Portugal – où il a eu un succès phénoménal -, on m’a proposé d’aller là-bas donner des interviews, faire des émissions… Je me sentais tellement timide, tellement redevable de ma double nationalité franco-portugaise, que je ne me suis pas trouvée à la hauteur d’assumer cette promotion. Ils ont été déçus. J’ai été trop perfectionniste sur ce coup-là : je pensais que je ne parlais pas assez bien portugais. C’est un vrai regret. J’aurais dû y aller. Au lieu de me mettre la barre tellement haute.
Vous regarderez-vous dans Poulets Grillés ?
L’équipe va se retrouver pour fêter ça, se regarder tous ensemble et pourquoi pas se moquer de nous-mêmes. Mais je l’ai déjà vu évidemment. Je regarde les fictions dans lesquelles j’ai tourné. En vraie téléspectatrice. Soit je suis prise dedans, soit pas du tout. Un regard toujours un peu curieux du résultat. C’est marrant.
Et le retour de Capestan ?
Ce serait super. Ça dépendra de l’audience de Poulets grillés. Sous quelle forme, j’en ai aucune idée. C’est à la production de décider. Je croise les doigts.
Poulets Grillés de Pascal Lahmani avec Barbara Cabrita, Hubert Delattre, Marie Petiot… Le 26 avril à 21H10 sur France 3.
Signature « historique » d’Edgar pour le cinéma, lecteur insatiable, collectionneur invétéré d’affiches de séries B et romancier sur le tard (Le Fantôme électrique, éd. Les Presses Littéraires).
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