Ne se refusant aucune fantaisie, la cuisine de ce chef humaniste, est tournée vers le bon produit. Sacré du titre de Meilleur Ouvrier de France (MOF) en 2019, il nous livre sa devise : « de la diversité naît la qualité ». Une philosophie qui lui a valu aussitôt une étoile au guide Michelin !
Ce militant d’une cuisine raisonnable et raisonnée sait que le secret d’une bonne table repose sur le meilleur produit associé au bon condiment tempéré par la bonne cuisson. Discret et reconnu par ses pairs, Frédéric Simonin a la force tranquille qui lui permet de dérouler sa partition avec une précision experte et inventive entouré par une équipe soudée. L’ambassadeur Bleu Blanc Cœur qui a publié un ouvrage aux éditions du Chêne sur la cuisine engagée et qui confie que « l’on reconnaît la grandeur d’une cuisine à sa simplicité » a donné récemment une nouvelle jeunesse à son restaurant gastronomique de la rue Bayen ouvert en avril 2010. L’écrin épouse un décor élégant et épuré au diapason de son art.
Ayant fait ses armes chez Ledoyen aux côtés de Ghislaine Arabian puis sous la bannière de Joël Robuchon, puis au Meurice, au Taillevent avec Philippe Legendre, avant de poursuivre encore au George V, le chef a gravi progressivement les échelons dans une prestigieuse ascension qui lui vaudra de recevoir en 2011 le titre de Chef de l’Année par le Guide Pudlowski. Cette passion et cette vision se prolongent dans des assiettes sublimées laissant place à des subtilités aromatiques rimant avec excellence et audace. On débute la dégustation, au cœur de l’espace conçu comme un « appartement parisien », en sachant qu’il s’agira d’un voyage culinaire laissant place à des produits de première qualité et une finesse d’exécution marqués par des associations saisissantes.
L’engagement de cette table éclairée.
On retrouve dans cette inspiration et cette spontanéité du moment de généreuses surprises où les assaisonnements sont travaillés avec la plus grande précision : « On fait ici avec ce que la nature et les hommes nous donnent à la saison » explique le chef qui a arrêté le système de carte pour lui préférer un état d’esprit marqué par le bon sens apte à valoriser les poissons de Lorient, les légumes du Vaucluse ou encore les pigeons du Maine et Loire via des sites agricoles locaux. On opte donc pour le menu déjeuner. Dans un premier temps, le Poulpe du Golfe de Gascogne passé à la braise, condiment Piquillos, texture de fenouil sauvage citron et basilic nous bouleverse par son inventivité joyeuse tandis que le Lieu jaune cuit nacré aux senteurs du Sichuan sous pétales de navet Daïkon au kaffir lime, râpée de ciron noir de Valence livre lui un ravissement pour les yeux et témoigne de l’engagement de cette table éclairée en faveur de produits sélectionnés en fonction des arrivages et du bon vouloir de Dame Nature.
A mi parcours, la purée culte selon Joël Robuchon, sous le récit et le brio de Pascal Drouet, directeur du restaurant et en charge de la carte des vins (qui a opéré quinze ans aux cotés de Marc Veyrat), fait rayonner l’art culinaire sous l’autorité du produit et l’évolution du goût. L’instant de pur plaisir communie avec l’extrême délicatesse et fraîcheur de la prestigieuse cuvée Louis Salmon Blanc de Blancs 2008 de Billecart-Salmon qui mêle l’élégance absolue et grande franchise. Enfin, arrive l’instant sucré du dessert, sous l’impressionnante technicité du chef pâtissier Guillaume Levasseur. Ce dernier nous plonge dans un monde de tendresse et de gourmandise avec la Pistache d’Iran dans un parfait glacé à la pistache nappé de cassis, biscuit jaconde au Kahlua. On pourrait résumer notre passage sans fausse note dans cet établissement de cœur et d’exception par cela : Une cuisine incarnée et marquée par une gastronomie française rigoureuse parfaitement consciente des enjeux de notre temps. Le mot transmission ici prend tout son sens !
Journaliste spécialisé en art contemporain et design, Clément Sauvoy est également commissaire d’exposition et collectionneur.
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