Les œuvres saisissantes d’Ahmet Ertug enregistrent et conservent la trace, aussi monumentale que possible, de la présence fragile des monuments. Au point qu’en cinquante ans, l’artiste a constitué, en quelque sorte, un musée imaginaire du monument mondial composé comme dans ce Voyage dans les pierres et la lumière, présenté du 9 février au lundi 20 mai 2024 à la Conciergerie, de bâtiments aussi divers que des églises, des temples, des palais, des théâtres, des bibliothèques, des escaliers monumentaux…
Photographe mondialement connu pour le travail qu’il conduit depuis quarante ans autour des grandes architectures patrimoniales, Ahmet Ertug est avant tout un formaliste qui aime les perspectives, les colonnes, les dômes, la manière dont l’œil fonce en avant vers un point idéal (the vanishing point) où la vue disparaît, basculant ainsi dans une autre dimension. Il aime aussi la luxuriance des détails dans le décor – mosaïques, fresques, plafonds peints, moulures sculptées ou ornées.
Peut-être cette extraordinaire qualité d’image doit-elle de manière plus immatérielle, au fait que le regard du photographe se fond dans son objet, sensible à la totalité de l’œuvre bâtie. Ce qui lui fait dire : « Je mets mes pas dans ceux de l’architecte qui a construit ce que j’ai sous les yeux. Puis je me demande où cet homme, dont des siècles me séparent, se serait posté pour contempler son œuvre. Alors seulement je m’installe. Toute l’âme du lieu ressuscite ainsi dans ma première image. »
Journaliste spécialisé en art contemporain et design, Clément Sauvoy est également commissaire d’exposition et collectionneur.
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