Du coté de la Tour-Maubourg, le chef Alberico Penati jongle avec les produits de saison, venus du terroir italien, dans des compositions aussi créatives que pointues. Le must ? Une carte des vins comptant pas moins de 400 références !
Face au jardin des Invalides, cette belle adresse cultive une identité transalpine singulière et personnelle qui a fait sa réputation auprès des gourmets attachés à une cuisine de tradition mais qui ne se prive pas d’audace. On arrive ici, donc, avec des attentes et une exigence légitimes. La charmante directrice Flore Bonnot (passée par Apicius, L’Ami Jean et Hélène Darroze) nous réserve le plus charmant des accueils. En l’absence, fort regrettable, du sommelier Massimo Iacono, ce jour-là, c’est elle qui se chargera de la partition des vins. De notre table, on touche presque du doigt le Dôme de l’Hôtel des Invalides. On sait que le chef, qui fait un passage éclair en salle, a sévi au Il Carpaccio, au Harry’s Bar et au Annabel’s à Londres.
Il nous prépare une sélection de plats, en accord mets&vins, aptes à prendre toute la mesure de son art. Un magnifique tartare de bar de ligne, fèves et pesto nous ouvre l’appétit. Avec cela, le superbe flacon d’un Soave Vigneti di Foscarino Inama, vin blanc tranquille, à base de Garganega et élevé sans utilisation de bois. Arrivent ensuite les ravissantes asperges vertes alla parmigiana et grosse gambas juste saisie à la méditerranéenne. Ce plat nous emplit de joie en nous plongeant, sans retenue, dans les merveilles de la douce région de Campani grâce à un sublime vin blanc, en mono cépage local falanghina élevé en cuve d’acier et fermentation en levure indigène.
Dans l’allégresse et l’échange.
Dans la foulée, une petite terrine de foie et de volaille rend hommage à la province autonome du Trentino. Flore propose d’accompagner cet instant magique d’un très beau nectar aux notes de groseilles et de fruits des bois. On aime ces tanins doux, entre belle complexité et longueur. Nous poursuivons notre déambulation culinaire, dans l’allégresse et l’échange, avec un plat terre-mer de haut vol : les fameuses raviolis de crabes et crème douce de cèpes. C’est réconfortant et les saveurs se fondent entre elles en échappant à des juxtapositions sans intérêt. L’assaisonnement et la cuissons sont parfaitement suivis. Quand se présente, le plat signature du chef, l’immanquable spaghetti-sardines à la Sicilienne, on constate que l’on est soignés par les équipes de l’établissement de bonne tenue qui donnent le meilleur d’elles-mêmes. C’est alors que l’on tend les bras à un remarquable Barolo de la région de La Morra sur l’une des plus belles parcelles.
Equilibré, il mouille le gosier avec grande élégance et nous mène dans le cœur vibrant du Piémont. Plus précisément au sud d’Alba, où s’étendent les vignobles ondulant à flancs de coteaux, caressés par les méandres de la rivière Tanaro. Ce terroir est le berceau de vins illustres garantissant une complexité hors du commun. Surprise de dernière minute, les Paccheri alla napoletana, font leur entrée avec sauce tomate, paleron de bœuf agrémenté de câpres et herbes fraîches. Ce « joyau » de la gastronomie italienne est par excellence le plat d’amour des grand-mères napolitaines. Un Montepulciano, ample aux notes de réglisse et de cuir, couronne ce moment de grâce. On aura droit (quelle abondance décidément) à une poêlée de cèpes alla genovese et polenta grillée avant le salvateur granité au citron de Sicile ! En quittant les lieux, on se dit que le chef déroule une cuisine particulièrement généreuse travaillée avec soin sur des bases traditionnelles et jouant à égalité avec un service d’une grande sincérité. Et cela fait toute la différence !
Journaliste spécialisé en art contemporain et design, Clément Sauvoy est également commissaire d’exposition et collectionneur.
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